[TRIBUNE] Au-delà de l’affaire Gérard Depardieu, il devient nécessaire de reconnaître davantage la légitimité de ces professionnels en France et de les intégrer plus largement sur les plateaux de tournage.
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EXTRAITS:
En tant que reflet et projection des comportements humains, le cinéma possède un rôle essentiel dans la compréhension et l’analyse socio-sexologique d’une société.
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L’émergence du métier de coordinateurs d’intimité découle d’une prise de conscience croissante de l’importance de protéger la vie privée, le consentement et la sécurité des actrices, mais aussi de tout professionnel (scénaristes, techniciens, monteurs, réalisateurs, etc.) officiant dans le monde de l’art. Leur présence vise à définir un cadre éthique clair et à s’assurer notamment que le respect du script –ou le consentement des acteurs en cas d’improvisation– soient au cœur de chaque prise
(…) HBO, société de production américaine incontournable à l’origine de plusieurs séries axées sur des scènes intimes et sexuelles, fait systématiquement appel aux coordinateurs d’intimité pour toutes ses productions, sans aucune exception.
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En ce qui concerne la France, de nombreuses associations et sociétés de production telles que MeTooMedia, le Collectif 50/50 ou Arte commencent à promouvoir les services des coordinatrices d’intimité –souvent des femmes– œuvrant dans notre pays. Le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), conscient des enjeux éthiques et du rôle primordial des consultants, travaille actuellement à mettre en place des formations et des certifications dédiées. Comme l’on fait appel à des spécialistes pour des cascades ou des cours de danse (ou tout autre domaine qu’un acteur se doit d’apprendre avant de jouer), pourquoi ne pas faire appel à des spécialistes ès sexe et intimité?
Les Français auraient-ils le monopole de la pratique sexuelle dans leurs gènes? Pourquoi un acteur (ou une actrice) n’aurait-il pas le droit de se sentir démuni ou de demander une formation pour pratiquer certaines scènes intimes avant de les tourner? Au nom de quoi l’intimité et les scènes de sexe en France échapperaient-elles à toute règle professionnelle d’apprentissage et de sécurité?
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Dans son poignant film Intimité (2001), Patrice Chéreau révélait lui-même qu’au nom du respect des acteurs, de l’intensité des prises et de l’esthétique recherchée, chaque scène avait été discutée au préalable entre lui et ses acteurs. Aucune prise n’avait été improvisée… À l’opposé, se trouve Bernardo Bertolucci qui, dans son Dernier Tango à Paris (1972), livra Maria Schneider –alors âgée de 19 ans– à «l’effet de surprise» d’une sodomie non définie au préalable dans le script, ce qui signifie littéralement: non consentie.
À ceux qui diraient que le cinéma est la vérité exposée, le poète Nicolas Boileau ne rappelait-il pas, au XVIIe siècle, que le vraisemblable était encore plus exigeant que le vrai?
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Magali Croset-Calisto — 18 janvier 2024